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La révolution numérique confronte la puissance publique à des défis inédits. L’un d’eux concerne l’exercice de la souveraineté même, entendue au sens large comme la capacité à agir de manière indépendante et à exercer l’autorité dont les pouvoirs publics sont démocratiquement investis, face à des acteurs internationaux dont la puissance croissante réside dans la maîtrise et l’exploitation de quantités considérables de données.

La géographie illustre mieux que n’importe quel autre domaine les mutations à l’œuvre dans la société numérique. Historiquement, la donnée géographique entretient un lien très étroit avec l’exercice de la souveraineté, d’abord dans sa dimension militaire. Citons, sans qu’il soit besoin de remonter à la « carte de Cassini », première cartographie homogène du territoire initiée par l’Académie des sciences en 1666, l’établissement de la carte d’état-major en 1817 ou à la création, quatre-vingts ans plus tard, du Service géographique de l’armée devenu en 1940 Institut géographique national puis, en 2012, Institut National de l’Information Géographique et forestières après sa fusion avec l’Inventaire forestier national (IFN). De nos jours, la puissance publique acquiert, produit et mobilise quotidiennement des données géographiques – et plus largement des données géolocalisées – à l’appui de ses décisions et de son action, dans des domaines aussi variés que la défense nationale, la sécurité, la prévention des risques naturels et technologiques, la fiscalité, l’urbanisme, les transports, la santé…

Illustrative, la géographie l’est aussi, et surtout, parce qu’elle constitue l’un des domaines dans lesquelles le risque de « disruption » de la puissance publique est le plus patent. Compte tenu de l’intérêt stratégique évident que présente l’information géolocalisée, les « GAFAM1 » ont constitué des fonds géographiques dont la richesse, la simplicité d’utilisation et la gratuité (à tout le moins pour les données de base et les usages élémentaires) en ont fait des produits de consommation courante pour les citoyens. Plus généralement, la société civile et des acteurs historiques de la géomatique jouent un rôle actif et positif dans la mutation de l’écosystème.

Le présent rapport fait donc le présupposé que la puissance publique, pour exercer souverainement ses prérogatives et accomplir ses missions d’intérêt général, doit conserver la maîtrise des données qui fondent ses décisions, au même titre qu’elle conserve celle de ses autres « infrastructures essentielles »2. Cette maîtrise conditionne non seulement l’efficience de l’action publique, qui doit pouvoir se fonder sur des données qualifiées, mais aussi la confiance que les citoyens3 placent en elle. Elle contribue également à la souveraineté nationale entendue dans son acception économique, en permettant à nos entreprises de ne pas dépendre de grandes plateformes étrangères pour accéder aux marchés et développer leur activité et en leur offrant un support à l’innovation (voiture autonome, livraison par drone, villes intelligentes…). Une telle approche ne signifie évidemment pas que la puissance publique doive se comporter en « forteresse assiégée » à l’égard des acteurs privés. Les autorités publiques ont parfois intérêt à coopérer avec eux dans l’élaboration de communs numériques ou à collecter leurs données lorsque le législateur leur reconnaît un caractère d’intérêt général.

La lettre de mission à laquelle s’efforce de répondre le présent rapport comportait un grand nombre de questions, dont la caractérisation même d’une donnée « souveraine » n’était pas la moins épineuse. Le calendrier des travaux était par ailleurs commandé par la nécessité d’articuler les réflexions ici conduites avec l’élaboration du nouveau projet d’établissement de l’IGN, elle-même inscrite dans le processus « Action publique 2022 ». Il a été, dans ce court laps de temps, choisi d’auditionner un panel aussi large que possible d’acteurs, publics et privés, concernés par les mutations du secteur de l’information géographique.

Les grands axes de la commande (souveraineté de la donnée, organisation optimale de la puissance publique en matière d’information géographique) sont depuis plusieurs années au cœur des réflexions de l’IGN et de ses autorités de tutelle. Comme le rappelle un rapport récemment consacré à l’institut par le Conseil général de l’environnement et du développement durable et le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux4, deux des trois orientations principales de son contrat d’objectifs et de performance 2013-2016 étaient déjà consacrées à la nécessité pour l’IGN de devenir une composante de la souveraineté et de l’indépendance nationale en fournissant aux administrations publiques les données de référence permettant une description du territoire faisant autorité, et d’ancrer son rôle d’opérateur de référence en matière d’information géolocalisée en organisant un système collaboratif d’échanges et de partage de données entre les acteurs publics et en favorisant leur diffusion. Certaines questions abordées dans les développements qui suivent étaient également en germe dans le rapport Lengagne sur les Perspectives d’évolution de l’information géographique et les conséquences pour l’IGN, pourtant rendu il y a près de vingt ans.

La persistance de ces interrogations trahit la difficulté qu’ont pu éprouver les pouvoirs publics à adapter leur organisation et leurs modalités d’intervention dans un contexte très évolutif, marqué par des initiatives foisonnantes et dispersées, ainsi que par des progrès technologiques rapides et continus. Les travaux dont le présent rapport est issu ont rapidement fait apparaître que l’extrême variété des données géographiques intervenant dans les décisions de la puissance publique et la complexité de l’écosystème d’acteurs que fait intervenir leur production se prêtaient mal à une approche monolithique ou systématique des solutions à mettre en œuvre.

Dans ces conditions, il n’est apparu opportun ni de conférer une portée normative à la définition des données géographique souveraines, ni de préconiser un modèle unique d’organisation et de gouvernance qui, bien qu'intellectuellement séduisant, aurait eu toutes les chances de demeurer théorique. Une production plus efficiente des données géographiques souveraines passe essentiellement par la sensibilisation des administrations aux enjeux de la maîtrise de ces données et par le développement de coopérations autour de projets communs dont l’animation nationale doit être renforcée. Le financement de cette production doit, conformément au choix des pouvoirs publics de privilégier l’open data, reposer sur l’impôt.

Les préconisations qui suivent se veulent avant tout réalistes et pragmatiques. Elles constituent à la fois des orientations générales pour l’action, des recommandations opérationnelles ciblées là où il est apparu que la réflexion était assez mûre pour en formuler et des suggestions d’expérimentations dont le succès conditionnera, le cas échéant, la généralisation.